14 Jan
14Jan

14/01/2018

Les commerçants du centre-ville de Vannes, déjà bien moribond en dehors des quais du port, ne sont pas contents : le bureau de Poste du faubourg Saint-Patern fermera bientôt ses portes. Ce quartier, ancien cœur historique de la ville depuis l’Antiquité et le plus vivant dans les années 80, s’est endormi. Au début des années 90, un homme lance une pétition contre les concerts dans les bars du centre-ville et les attroupements dans les rues. A peine arrivé de Paris, les élus lui emboîtent le pas. Il parvint en quelques jours à museler les tenanciers de débits de boisson et la jeunesse vannetaise.

Depuis, Saint-Patern est à l’image des centres-villes des territoires sous la coupe de la France parisienne : des retraités de l’extérieur ont acquis les plus beaux appartements, les autres logements sont des résidences secondaires ou totalement inoccupés par l’enclavement recherché par les nouveaux habitants. La politique urbaine en vogue fait le reste : les centres perdent leur raison d’être de cœurs névralgiques pour devenir des secteurs peu accessibles par le très bobo-parisien tout piéton, des voies à 20 ou 30 km/h reproduisant des chemins de villégiatures et surtout, des actifs de plus en plus éloignés de l’aire urbaine par la flambée du prix de l’immobilier due aux innombrables acquéreurs aisés de France. Chacun connaît la suite : les commerces ne tiennent plus – les grandes surfaces périphériques disproportionnées et ô combien plus accessibles leur donnent le coup de grâce. Enfin, pour être certain qu’il n’y a plus souffle de vie, l’Etat fait asphyxier puis supprime les services publics, derniers remparts contre le phénomène de « down-town » connu de longue date aux Etats-Unis. On aura décidément tout copié des Américains, le meilleur comme le pire. 

Nous connaissions déjà les conséquences de la fermeture des services publics en zones rurales : l’accroissement de la désertification. Il faudra désormais entendre que cet Etat souhaite rayer de la carte nos agglomérations ou s’en emparer pour en faire de grands centres de retraites pour ceux que nous avions déjà assistés durant l’essentiel de leur vie. La mort de territoires entiers est une aubaine pour cette France centraliste et post-colonialiste qui, dans le même esprit, se verra faciliter dans sa politique centralisatrice des pouvoirs, des hommes et des finances. Cette vue d’esprit a de tout temps fait la France, c’est son essence même et celui de ses tenants politiques et financiers. 

 

De nombreuses fermetures de bureaux de Poste programmées en Bretagne

 

La Poste se refuse de révéler des chiffres. En interne, les salariés sensibilisés parlent d’une hécatombe. « Partout, des fermetures sont planifiées. Nantes sera durement touchée. A Rennes, 7 bureaux ont déjà disparu en 2017 et en ce début 2018. A Saint-Brieuc, la Poste vient d’annoncer 3 fermetures. Brest, ce sont 4 bureaux. Et, encore, on ne parle pas des bureaux de campagne où c’est commencé depuis des années. Mais la poste ne donne jamais de chiffres et annonce les fermetures à la dernière minute. Sur tout l’Hexagone en 2003, il avait été décidé de fermer les portes de 17 000 bureaux. Ça a continué ensuite. En 2017, 8500 ont été supprimés. Il serait prévu en plus, d’ici 2020, entre 2500 et 3000 fermetures. »

 

L’Etat abandonne consciemment les territoires et privatise en attendant la disparition totale du tissu socio-économique

 

En se débarrassant des services publics, la France et ses forces politiques encouragent de déléguer les missions aux commerces ou aux collectivités locales, ces dernières déjà bien appauvries par la réquisition des impôts (baisse des dotations). Des points relais sont ouverts dans les supermarchés, dans les derniers commerces de proximité des bourgs, parfois dans les mairies… De 2008 à 2016, La Poste a vu son activité courrier chuter lourdement de plus de 30%. Un manque à gagner estimé à 500 millions d'euros par an. Le développement exponentiel d’Internet y a largement contribué. Ce sont désormais les Colissimo qui sont mis en avant plan plus que les courriers. 97 % des revenus courriers proviennent d'entreprises, lesquelles lancent des appels d'offres au niveau international pour bénéficier de tarifs plus compétitifs. Est-ce une fatalité ? Non, la direction de la Poste a demandé du jour au lendemain que ses employés formés sur des métiers précis changent leur fiche de poste. Les salariés ont dû devenir banquiers, un métier pour lequel ils n’avaient pas signé, alors même que le Ministère ne chercha pas à adapter les services publics postaux aux dernières technologies. Que les intentions de l’Etat et de « ses services » ne soient pas très vertueuses est un pas que nous n’oserons franchir.

En Catalogne, en Communauté autonome basque, en Flandre… le regard du parlement et les moyens financiers conservés conformément à leur statut, mis à leur disposition, permettent de pallier les déficits ou les choix volontaires de l’Etat. C’est mieux qu’un statut de région française mais moins bien que la souveraineté. 

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