18 Feb
18Feb

A l'heure à laquelle j'écris, ce mercredi 17 février 2021, la Terre tremble pour la septième fois de la journée.

Bien souvent, les médias se veulent rassurants. La Bretagne connaît un regain d’activité sismique ces dernières années sans gravité, les secousses sismiques étant de faible intensité. Toutefois, l’Histoire nous dit que plusieurs centaines de tremblements de terre ont secoué la Bretagne depuis le haut-Moyen-Âge. Certains séismes sont remarquables :

- En 1286, la Chronique de Saint-Brieuc indique qu’à la mort de Jean Ier, souverain de l’Etat breton, le 8 octobre, la terre tremble dans toute la Bretagne, pendant 40 jours et plusieurs fois par jour. Surtout à Vannes, où le tremblement fut continuel et renversa de nombreux édifices. Puis, des tremblements se firent sentir pendant près d'un an principalement à Vannes, mais avec des intervalles (Pr. I. 41). Les habitants y avaient vu un signe céleste ;

- En 1427, un tremblement de terre se fait sentir depuis Montpellier jusqu'en Hollande. La ville de Nantes est en partie renversée. 13 villages sont engloutis dans la contrée de Dol, 55 en Hollande (Chèvremont) ;

- En 1799, un séisme est ressenti sur toute la façade atlantique. Il a pour centre le Marais Breton à la frontière sud de la Bretagne, en Vendée. « Des quartiers surtout sont abîmés, des maisons ont écroulé en entier (sic, concernant l'emploi de l'auxiliaire avoir), les habitants obligés de se sauver par les brèches des murs et de la toiture. D’autres maisons, les murs au ras des terres, se sont détachées de leurs fondements et déportées soit en avant soit en arrière », explique le jour même, le sieur Mignon, commissaire du Directoire exécutif auprès du canton de Bouin ; 

- En 1902, un séisme de 6 sur l’échelle de Richter est principalement ressenti à Belle-Île ;

- En 1930, toujours dans le pays de Vannes, un fort séisme dont l’épicentre était à Meucon, estimé entre 7 et 8 sur l’échelle de Richter (en réalité, entre 5 et 6 sur les critères actuelles), secoua le Golfe du Morbihan. Il fut précédé de plusieurs répliques ; 

- En 1959, de Quimper à Melgven, une importante secousse, déterminée d’environ 6 sur l’échelle de Richter, fit d’importants dégâts matériels. Le séisme fut ressenti jusqu’à Paris selon les témoignages de l’époque.

- Celui d’Hennebont, le 30 septembre 2002, ressenti à plus de 100 kilomètres à la ronde, atteignait les 5,4, à 13 km de profondeur. « C’est le plus fort enregistré dans la région depuis que les instruments de mesure, notamment pour la localisation, sont jugés fiables, au tout début des années 80. On avait constaté des chutes de cheminées, des murs lézardés », se rappelle Julie Perrot, sismologue à Plouzané (29), du laboratoire Géo Sciences Océans, dans les locaux de l’IUEM (Institut universitaire européen de la mer, source : Le Télégramme, édition du 21 août 2019).

Une cordillère des Andes

Le cisaillement sud-armoricain concentre la plupart des tremblements de terre de Bretagne. Il part du Sillon de Bretagne à Nantes, passe par la dépression des Landes de Lanvaux, pour finir dans l’Océan, à la Pointe du Raz. Il faut imaginer une cordillère semblable à celle des Andes, culminant à 6000 m. d’altitude, lors de la collision continentale hercynienne il y a 330 millions d’années. Le massif armoricain subit aujourd’hui une double pression, celle des Alpes et des Pyrénées à l’Est et au Sud, celle de la dorsale atlantique à l’Ouest. Dans la progression du continent africain vers le nord, la plaque eurasienne se déforme ; la faille sud-armoricaine est un espace de réajustement glissant d’Est en Ouest en son Sud et d’Ouest en Est au Nord. Le Nord du cisaillement breton subit un « rajeunissement » tandis que son Sud s’effondre. Les espaces maritimes entre les îles du Golfe étaient des vallées et la mer commençait bien plus loin que l’actuel littoral par cet effondrement progressif et la montée des eaux. Le phénomène est désormais accéléré par le réchauffement climatique.

L’activité tectonique en Bretagne fait bel et bien partie de son histoire.


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Compléments :


Les effets de la main de l'Homme 




Photographies : profonds terrassements entre Saint-Avé et Vannes, derrière l'hypermarché Super U ; un exemple de relief arrasé dans la commune de Grand-Champ.

Forages et carrières sont parfois à l'origine de déséquilibres de la surface terrestre, aggravés lorsque l'extraction de tonnes de roche se situe près de cisaillement ou de failles sismiques. Cette pression s'ajoute aux forces naturelles déjà présentes. On l'a vu en 2015 dans l'Oklahoma, un Etat des Etats-Unis qui a connu plus de 900 séismes d'une magnitude supérieure à 3 sur l'échelle de Richter à la suite de forages de géothermie ; en France, ça a été le cas en Ardèche en novembre 2019, magnitude 5,4, ou encore près de Strasbourg, le 12 novembre 2019, où s'est produit un séisme d’une magnitude de 3,1 sur l’échelle de Richter.

Les 7 secousses sismiques de ce mercredi 17 février 2021 dans la région de Vannes ont toutes leur épicentre à l'Ouest de Vannes, aux alentours de Ploeren. A vol d'oiseau, ces épicentres peu profonds sont situés entre les nombreux terrassements et les extractions importantes de roche de Saint-Avé et de Grand-Champ (exemple de la carrière de Poulmarh).

Selon les études du CNRS et le rapport de sismologues en Ardèche et près de Strasbourg, ces extractions ont un effet de déclenchement prématuré de séismes. C'est en quelque sorte la main de l'Homme appuyant sur le bouton ON.

Ces destructions profondes des sols ont aussi pour effet d'anéantir définitivement les espaces d'entrance des eaux pluviales et les écoulements souterrains. Les sources et les réserves d'eau sont ainsi détruites de manière irréversible. Ceci, combiné à la destructions des zones humides et des bassins versants, a également des conséquences sur les aires naturelles de rétentions d'eau (les "zones éponges" et de régulation des eaux pluviales, entraînant des inondations lorsqu'elles sont supprimées, en période de fortes précipitations (voir les récentes actualités à ce sujet). On se souviendra par ailleurs de l'aménagement des réservoirs de rétention d'eau en sous-sol de la ville de Vannes, notamment près des remparts et de sa partie antique (où sont visibles des moellons du IIIème siècle), afin de juguler l'arrivée des eaux pluviales et d'éviter ainsi les inondations que nous avions connues en centre-ville. Enfin, cet effacement d'espaces naturels de premier ordre est aussi une atteinte considérable à la biodiversité du règne animal et végétal quand on sait que ces milieux regorgent d'espèces protégées et que beaucoup d'autres espèces en dépendent (40 %). Or, les 2 tiers des zones humides ont déjà été détruits.

Pour la petite histoire, Anne Gallo, maire de Saint-Avé, est aussi à la Région vice-présidente - Chargée du tourisme, du patrimoine et des voies navigables ! 😅

Une pensée au passage pour l'ancienne belle zone humide de Beau-Soleil, où se trouvait l'une des sources de la Marle, la rivière des remparts de Vannes, et où les hauteurs arrasées empêcheront même l'entrance des eaux pluviales dans le bassin versant... Enfin, ce qui l'en reste. Et ce n'est pas la seule zone humide de Saint-Avé détruite. Son prédécesseur, Hervé Pellois, député de la 1ère circonscription du Morbihan, avait déjà bien entamé cette basse besogne.

Le maire de Grand-Champ, Yves Bleunven, est quant à lui président des maires du Morbihan 😅. Ce dernier rembourse les emprunts toxiques souscrits par sa municipalité en profitant de la spéculation immobilière du littoral et de Vannes par la construction sur sa commune de lotissements dortoirs à perte de vue... avec les terrassements, les déboisements à échelle industrielle et les routes et rocades que nous connaissons ces dernières années. Les reliefs sont profondément entaillés et les collines ainsi coupées en deux par endroit. C'est "joli", on dirait des parts de gâteaux géants !

Nous sommes aussi dans le Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan... 😅

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